La mort de Kadhafi dévoile les réelles positions du CNT, la
forte islamisation du pays, les intentions du Qatar et met fin aux
espoirs d'une démocratie à l'occidentale.
Le dimanche 23
octobre, Mustapha Abdel Jalil, président du Conseil National de
transition libyen a déclaré devant plusieurs milliers de personne à
Benghazi, capitale de la Cyrénaïque, là d’où est parti le mouvement de
protestation qui a fini par renverser le colonel Kadhafi, avec l’aide de
l’Otan :
« En
tant que nation musulmane, nous allons adopter la charia islamique,
comme source de droit, donc, n’importe quelle loi contredisant les
principes de l’Islam sera légalement nulle ».
Cette
déclaration met fin aux espoirs de tous les naïfs droit-de-l’hommistes
qui voyaient déjà la Libye passer de la Jamahiriya du colonel Kadhafi à
une belle démocratie à l’occidentale. En la faisant, Mustapha Abdel
Jalil tente de sauver le CNT avant qu’il ne soit balayé par les nouveaux
« warlords » qui contrôlent aujourd’hui la Libye. En effet, le CNT à
qui ont fait confiance, aveuglément, certains pays occidentaux, dont
la France, est une union boiteuse entre anciens affidés de Kadhafi, des
inconnus de la société civile et des islamistes.
On
oublie que Mustapha Abdul Jalil a été le ministre de la Défense de
Kadhafi et qu’il a requis deux fois la peine de mort contre les
infirmières bulgares parfaitement innocentes. Cela fait un peu désordre
pour le représentant officiel de la nouvelle Libye.
En
plus le CNT de dispose d’aucun pouvoir. Il n’a ni service de
renseignement, ni forces armées. Les hommes armés, les thuwars, qui
tiennent la Libye, appartiennent à plus de 40 Katibas, dont presque
aucune ne reconnait l’autorité du CNT. Chaque ville importante a la
sienne : Misrata, Zentan, le djebel Nafoussa, Tripoli.
En
plus, les plus importantes sont islamistes. Par exemple celle
d’Abdelhakim Belhadj, auto-proclamé "gouverneur militaire de Tripoli" à
la tête d’une petite armée.
La
façon dont il a pris le pouvoir de la ville est révélatrice. Il a
convoqué la chaîne qatarie Al Jazirah et a annoncé qu’il prenait le
pouvoir. Sans avoir averti le CNT. Lorsque celui-ci a protesté,
Abdelhakim Belhadj a fait la sourde oreille et tient toujours Tripoli.
Avec le soutien silencieux et efficace du Qatar.
On
a sous-estimé le rôle de ce petit émirat richissime. Les Américains ont
cru qu’il voulait les aider, en donnant une caution musulmane à
l’action de l’Otan. En réalité, le Qatar a joué son jeu :
aider à établir un état islamique en Libye. En goinfrant d’armes et
d’argent les Katibas les plus islamistes.Comme celle de Belhaj ou celle
d’Ismael Salabi , ou la Katiba des Martyrs d’Abu Salim, dirigée par Abu
Sofiane Qumu, un ancien de Guantanamo.
Le
plus virulent est surement Abu Bukatalla, chef de la Katiba Obaida Ibn
Jarrah, un Takfiri, soupçonné d’avoir assassiné le 27 juillet le général
Abdul Younes mis en place par le CNT pour tenter d’unifier les Katibas
sous sa houlette.
Aujourd’hui,
le général Younes est mort et les Katibas se regardent en chiens de
faïence, les mieux armés étant les islamistes. Il y a, surtout, des
dizaines de milliers d’armes en circulation, tous les dépôts d’armes
ayant été pillés. Certes, les thuwars ont gaspillé beaucoup de munitions
pour manifester leur joie, mais il en reste encore.
Tout
cela était prévisible. Lorsque Nicolas Sarkozy est venu à Benghazi en
septembre, il a été accueilli aux cris de «Allah ou Akbar ». Ce n’était
pas de la provocation, simplement l’expression du sentiment populaire
libyen. La seule loi valable doit venir de Dieu. Le mot démocratie
n’existe même pas.
On a peint l’avenir de Libye en rose. Il risque d’être vert.
Auteur:Gérard de Villiers est un journaliste, écrivain et éditeur français,
célèbre pour ses romans d'espionnage S.A.S, traduits en plusieurs
langues.
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