samedi 26 novembre 2011

Danielle Mitterrand : obsèques d’une femme d’engagements

Les obsèques de Danielle Mitterrand, disparue dans la nuit de lundi à mardi à l’âge de 87 ans, auront lieu cet après-midi à Cluny (Saône-et-Loire).



Les hommages, nombreux, unanimes, décrivent Danielle Mitterrand comme une femme libre, très peu protocolaire, forte de ses engagements, de ses idéaux, de ses combats et de sa complexité. Elle est considérée par ceux qui l’ont connue et approchée comme une figure forte de la gauche et une première dame atypique qui avait souvent gêné la diplomatie française par des prises de position pas toujours «politiquement correctes». Lorsqu’elle entre à l’Elysée en 1981, elle prévient qu’elle ne sera jamais une épouse de chef d’Etat potiche. Elle utilise la tribune que lui offre son statut d’épouse de président de la République pour se consacrer à la défense des droits de l’homme. Elle défend les causes kurde, tibétaine, sahraouie, elle dénonce la politique d’immigration de Charles Pasqua.
Elle crée la fondation France-Libertés en 1986 avec pour missions de «défendre les droits de l’homme, le droit d’accès à l’eau pour tous et le droit à l’autodétermination des minorités ethniques» et pour «construire un monde plus juste et plus solidaire dans lequel chacun puisse exercer sa liberté dans le respect de l’autre».

Danielle Mitterrand à El Watan (24 décembre 2001) 

La présidente de la fondation France-Libertés s’était rendue, courant novembre 2001, dans les camps de réfugiés sahraouis à Tindouf, alors que sa visite dans les territoires sahraouis occupés avait été empêchée par les autorités marocaines. Dans une interview qu’elle nous avait accordée (El Watan 24 décembre 2001), Danielle Mitterrand nous affirmait : «La mission dans les camps de réfugiés sahraouis à Tindouf et la mission complémentaire au Maroc entrent dans les objectifs de la culture de la paix de la fondation France-Libertés. On ne peut pas construire la paix si on ne respecte pas les populations.»… «J’ai été… très émue par les conditions de vie des réfugiés, notamment les jeunes. Quand on voit monter la colère dans le regard des jeunes, on se sent coupables de n’avoir rien à leur offrir. La situation sanitaire et alimentaire des réfugiés a empiré depuis deux ans du fait du désengagement du Programme alimentaire mondial.
Toutefois, la population reste déterminée à exercer son droit à se prononcer sur son sort dans le cadre du référendum d’autodétermination des Nations unies.»… «Nous défendons le plan de paix de l’ONU avec d’autant plus de conviction que c’est François Mitterrand qui l’avait proposé. C’est une cause juste. Le plan de paix a été la toile de fond du règlement du problème sahraoui jusqu’au moment où on est reparti sur d’autres intentions qui ne répondent pas aux aspirations du peuple sahraoui.»... «La communauté internationale se montre incapable de mettre en œuvre le plan de paix des Nations unies. Pendant ce temps, le Maroc conclut des accords de prospection pétrolière illégaux avec des compagnies étrangères (l’accord conclu avec TotalFina, ndlr) dans les eaux territoriales sahraouies, alors que le Sahara occidental ne lui appartient pas légalement.»… «La paix dans la région du Maghreb ne sera durable que grâce à la tenue d’un référendum d’autodétermination du peuple sahraoui.»
Danielle Mitterrand était également très sensible à la question des disparus, à travers le monde, et de leurs familles. A Alger, début novembre 2001, elle avait rencontré quelques-unes de ces familles et leurs associations qu’elle avait soutenues dès leur création. Voilà ce qu’elle en disait dans la même interview : «Quel que soit le pays où ces associations (de familles de disparus, ndlr) sont constituées, le drame est le même. Notre ambition est de faire un grand réseau dans le monde entier entre les associations de familles de disparus.»
Danielle Mitterrand évoquait, par ailleurs, la création en juin 2001 – dix ans avant la révolution tunisienne – du Réseau euro-méditerranéen de la jeunesse citoyenne à l’initiative de deux jeunes défenseurs tunisiens des droits de l’homme.
Nadjia Bouzeghrane

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