lundi 21 novembre 2011

Algérie:Bref rappel des faits pour quelques questions


Après 1988, lorsque l'Algérie s'est engagée dans la voie démocratique, par le pluralisme politique et les élections libres, les islamistes ont largement gagné. Par deux fois, aux municipales (1990) et au premier tour des législatives (1991-92). C'était le prix de la démocratie, mais que les vaincus ne voulaient pas payer. Les vaincus, c'est-à-dire le pouvoir encore en place, bien que vacillant, et l'opposition non islamiste, démocrates et progressistes en tête, qui se sont alliés et se sont mobilisés contre les vainqueurs, c'est-à-dire contre le Fis. Inutile d'argumenter pour les uns contre les autres, on ne refait pas l'histoire. Les faits sont là. Très vite, le combat politique s'est discrédité et c'est à la violence que fut délégué le soin de départager les adversaires, qui vont par conséquent devenir les «ennemis». Le cauchemar a commencé pour tous les Algériens, qui va durer une décennie entière avec, à la clef, des dizaines de milliers de morts et une régression multiforme. Car le prix de la démocratie, il faut le payer d'une manière ou d'une autre, que l'on avance ou que l'on recule. Mais jusqu'où faut-il encore continuer à payer ? La question se pose dramatiquement à mesure que l'aspiration à une paix «coûte que coûte» devient impérieuse. Au final, les tenants de la «réconciliation nationale», version pouvoir - il en existait une autre,  version opposition, portée par le Ffs - l'ont emporté sur les éradicateurs (progressistes, démocrates et individualités diverses regroupés derrière une autre partie du pouvoir composée notamment de quelques officiers supérieurs) et dont la cohérence était loin d'être la vertu cardinale. Ici aussi, inutile d'argumenter en faveur ou en défaveur de qui que ce soit, les passions humaines étant ce qu'elles sont. Nous vivons depuis lors une autre décennie, celle de cette réconciliation          qu'incarne, même si elle n'est pas entièrement de son fait, Bouteflika. Elle signifie que, la démocratie remisée, le nationalisme était de retour, à peine relooké. Le mal est préférable au pire, dit-on ; voilà ce à quoi a abouti notre malheureuse expérience. Mais les mêmes causes ne provoquent-elles pas les mêmes effets, le destin naturel du mal n'est-il pas d'empirer ? Derrière le mot d'ordre «tout sauf la démocratie», l'actuel pouvoir a su bâtir, par delà la personnalité propre de son chef (dont j'ai décrit, dans un ouvrage paru en 2004, toutes les «qualités» pour ce boulot), un système stable fait d'oublis et d'illusions, grâce en particulier à la manne pétrolière. Nous avons gagné la paix par la peur, peut-on affirmer aujourd'hui. Par le renoncement, voire le reniement. Certains diront par la lucidité et la sagesse. L'heure des bilans viendra. Mais de nouvelles générations sont à l'œuvre pour lesquelles, heureusement, les «acquis» dont se gargarisent nos dirigeants, à juste titre parfois, ne sont que pure propagande. Car en vertu de quoi ces générations nouvelles doivent-elles aujourd'hui réparer les erreurs des anciennes, qu'elles soient au pouvoir ou dans l'opposition ? Pourquoi les écouteraient-elles, tenteraient-elles de les comprendre, les suivraient-elles ?

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