Il est établi que
tout colonialisme doit disposer de suffisamment de puissance de feu
et d'une solide base économique et sociale. Sans cela, il doit
saigner ses citoyens et pressurer ses colonisés pour tenir un tant
soit peu sa position. C'est le cas du Makhzen qui s'entête dans ses
rêves de grandeur d'un autre âge, quand il faut plutôt œuvrer à
offrir au peuple marocain des perspectives de paix et d'expansion
économique dans une Afrique du Nord qui n'attend que l'unité
territoriale et la mise au placard des velléités hégémoniques que
même les grands de ce monde ne peuvent réaliser et assumer. Depuis,
la pittoresque et ridicule marche verte et les honteuses péripéties
d'une occupation, passée d'un mesquin plan de partage à
l'acceptation d'un référendum d'autodétermination pour aboutir à des
manœuvres dilatoires qui ne tiennent que grâce à la retenue des
Sahraouis et à la complicité de cette «communauté internationale»,
férue sélective des droits des peuples. Au Sahara, les dizaines de
milliers de soldats et les milliers de «colons» stipendiés, qui
aspirent une bonne part du budget famélique du royaume, n'ont pas
réussi à modifier d'un iota la configuration sociopolitique de la
population qui a pris la fâcheuse habitude de se soulever. Après la
formidable démonstration de l'an dernier, durement réprimée par la
soldatesque du roi, voilà que les Sahraouis font encore une fois
irruption sur la scène. C'est à Dakhla, où ceux qui font office de
«colons» se sont permis de les traiter en tant qu'«indigènes», en
les agressant à propos d'un match de football maroco-sahraoui, que
des affrontements ont eu lieu. Cela s'est produit dimanche dernier.
Les «colons» ont été soutenus par des policiers en civil et protégés
par la glorieuse armée de sa majesté alaouite. La preuve que la
monarchie ne tient le territoire que par la force. Mais, la violence
commence à bien faire dans la tête d'un peuple qui s'impatiente
désormais de la duplicité de l'ONU et de toutes ses «démocraties»
qui, pour certaines, participent au pillage de leurs ressources en
dépit de toutes les résolutions onusiennes et de la légalité
internationale. A bien y penser, il se pourrait qu'à force de tirer
sur la corde, le roitelet finisse par faire que le Polisario,
lui-même, ne soit plus en mesure de vendre ce»processus de
négociations». Il faut, à ce sujet, prendre au mot les
avertissements que les responsables sahraouis sont en train de
lancer depuis peu. Ils sentent que la bride est en voie de casser,
d'autant que le pitoyable aspirant à l'empire ne repose que sur la
procuration que lui offre son allégeance éhontée aux maîtres de
l'heure, inquiet voire terrorisé qu'il est face à l'idée de
renversements d'alliances, qui laisseraient balayer son trône à la
moindre bourrasque. Le statu quo observé par les décideurs peut
dénoter de la volonté de ne pas compromettre cette possibilité. Et
si l'Algérie se mettait à chasser sur les mêmes terres que le
Makhzen ? L'offre serait par trop inégale pour les maigres avantages
que présente leur «ami le roi». Au train où vont les choses, on
n'est pas loin d'une issue qui y ressemble. Isolé, pressé de toutes
parts, le pouvoir algérien peut faire un pied de nez à M6. Il a bien
fustigé Aïcha Kadhafi. Il peut plus. Le monarque de l'Ouest devrait
faire très attention.
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