A chaque fois que
les relations algéro-françaises sont évoquées, ce sont les 132 ans
de colonisation, le 1 million et demi de martyrs, la torture, la
privation, le retard culturel, économique… qui envahissent les
esprits. Et pas l'ombre d'un pardon à l'horizon du côté algérien,
puisque pas l'ombre d'une repentance du côté français.
Nous nous
rappelons toutes les excuses et les arguments des hommes d'affaires
français qui, au lieu de penser économie, se sont retrouvés à parler
histoire, à l'image de M Jean-Pierre Raffarin qui était à la tête
d'une délégation assez intéressante. Cette même histoire que les
hommes politiques évitent, le moins que l'on puisse, dire
malignement. On est allé jusqu'à mettre en circulation un concept
qui, disons-le, très significatif : «les sujets qui fâchent». Mais
y'at-il une volonté politique de parler objectivement de l'histoire
de l'autre côte de la Méditerranée ? A vrai dire, rien ne le présage
! Avant-hier et avant-hier seulement, le président français, Nicolas
Sarkozy, a donné la preuve : dix harkis ou supplétifs ont été
décorés lors d'une cérémonie aux «Invalides» à Paris à l'occasion de
la journée nationale d'hommage aux anciens combattants de la guerre
d'Algérie. Accompagné du secrétaire d'Etat à la Défense Marc
Laffineur, le Chef de l'Etat français a également déposé une gerbe
en leur hommage. Aucun mot n'a été soufflé de sa part, dira-t-on,
mais le geste est, à plus d'un titre, significatif. Osons-le mot
provocation pour dissiper le doute. Donc, sur un plan plus au moins
politique, les choses ne semblent pas avancer et c'est du côté
français que ça coince le plus.
Sur un autre
chapitre, enfin d'autres chapitres à l'instar de la culture, on sent
que la France souhaite amorcer une nouvelles dynamique, tout comme
sur le plan économique, mais ne perdons pas de vue le fait que sur
ce dernier plan, les Français connus pour leur fine bouche, vivent
une situation un peu difficile et le besoin de nouveaux marchés
s'est clairement manifesté chez-eux. Et l'on sent qu'à défaut d'être
directs en regardant la réalité en face, ces mêmes Français tentent
des solutions biaisées. Exemple : les deux pays aux 132 ans de
passé commun marqueront chacun le 50ème anniversaire de
l'indépendance de l'Algérie. Ce n'est pas tout. Les deux pays
partageront aussi des manifestations.
C'est ce qu'ont
déclaré avant-hier à Alger les deux ministres de la Culture, le
Français Frédéric Mitterrand et l'Algérienne Khalida Toumi. «La
position de Mme la ministre ne peut pas être la même que la mienne
mais on peut se retrouver sur ce qu'on veut construire», a déclaré
M. Mitterrand à l'issue d'une séance de travail avec son homologue
algérienne, lors d'une visite d'une journée à Alger. La déclaration
du ministre est, voyons-le, porteuse d'un sacré questionnement qu'on
peut résumer ainsi : peut-on danser la tango et le slow sous les
notes de la même musique ? Pas toujours évident, car l'Algérie et la
France n'arrivent pas à voir leur passé commun avec le même œil et
la repentance que l'un demande est inadmissible pour l'autre.
Le ministre
français de la Culture ajoute en se référant aux années de guerre
meurtrières qui ont mené à cette indépendance et à la présidentielle
en France en 2012 : «C'est déjà un anniversaire chargé, compte tenu
des circonstances historiques et en même temps nous serons en pleine
campagne présidentielle ce qui va évidemment exacerber une campagne
contradictoire». Pour sa part, la ministre algérienne dira qu' «il y
a toujours un pont humain, des espaces très forts et très vivants
d'échanges et de dialogue». « Le cinquantenaire sera célébré en
accord avec notre vision des choses mais je suis prête à regarder à
partir de ce pont humain ce qu'on peut célébrer ensemble».
On ne peut donc
tout célébrer avec le français à se fier à la déclaration de Mme la
ministre. Sera-t-elle une célébration commune sans trop de spectacle
ou ne touchera-t-elle pas aux sacrifices de tout le peuple ? Car,
cela va de soi, parler de la victime c'est évoquer le bourreau. Et
un pays est un tout, complexe hétérogène certes, mais un tout !
Enfin notons que
les deux ministres -qui sont de la Culture- ont discuté «de
possibilités» sur lesquelles les deux pays peuvent approfondir la
collaboration culturelle dans les domaines de la musique, de la
danse, et des livres....
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